Le droit de l’urbanisme français contraire à la Convention européenne des droits de l’homme ?

 Ö La Cour européenne des droits de l’homme a condamné la France au titre de l’article L461-1 du Code de l’urbanisme.

 Ö Le droit de visite prévu par l’article L461-1 du Code de l’urbanisme (dans sa rédaction antérieure à la loi ELAN) contrevient aux dispositions de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme qui proclame le droit au respect de la vie privée et familiale.

La France a récemment été condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme sur le fondement de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme qui proclame le droit au respect de la vie privée et familiale.

La Cour européenne des droits de l’homme a en effet estimé dans son arrêt du 16 mai 2019 (Halabi c/France, req n°66554/14), que l’article L461-1 du Code de l’urbanisme, qui prévoit un droit de visite au profit des agents de l’administration, afin de vérifier l’absence d’infractions ou irrégularités urbanistiques après l’achèvement de travaux de construction, ne met pas en œuvre suffisamment de garanties contre les abus.

Pour la Cour européenne, si ces dispositions poursuivent un but légitime de prévention des infractions pénales, l’absence d’encadrement juridique de ces visites et notamment l’absence d’autorisation de la part de l’occupant des lieux et le défaut de voie de recours contre celles-ci constituent une disproportion entre le but poursuivi et les mesures mises en place pour assurer ce contrôle.

A défaut de précision de la loi sur les modalités d’exercice de ce droit de visite, des réponses ministérielles (30 Janv. 1989, 31 Janv. 2006 et 2 Fév. 2006) avaient énoncé que les agents de l’administration devaient recueillir le consentement du maître des lieux. Aussi, l’article L432-8 du Code pénal condamne le fait qu’une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public s’introduise ou tente de s’introduire dans le domicile d’autrui contre son gré. Seulement, la Cour européenne des droits de l’homme ne s’est pas montrée réceptive face à ces dispositions. En effet, les réponses ministérielles n’ont aucune valeur normative et la possibilité de s’opposer à la visite reste très théorique, l’opposition à la visite constituant une infraction pénale selon l’article L480-12 du Code de l’urbanisme. 

La loi ELAN du 23 novembre 2018 intervenue entre la requête et le jugement a modifié l’article L461-1 du Code de l’urbanisme, imposant d’obtenir l’accord préalable de l’occupant des lieux à défaut de décision de justice, ainsi que sa présence lors du contrôle. Les articles L461-2 et L461-3 du même Code ont également été modifiés. Ils prévoient désormais notamment des horaires hors desquels la visite ne peut avoir lieu et la nécessité de l’accord du juge des libertés et de la détention lorsque le maître des lieux oppose un refus à l’exercice du droit de visite.

                     Le régime antérieur à la loi ELAN se trouve donc condamné et les visites effectuées sous ce même régime fragilisées. La nouvelle version de l’article L461-1 du Code de l’urbanisme devrait trouver grâce aux yeux de la Cour européenne des droits de l’homme en ce qu’elle encadre plus précisément les modalités d’exercice du droit de visite.

 

04/09/2018 Marine Reynier

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