Sort du prix de vente dans une SCI démembrée : la Cour de cassation s'engage davantage dans le quasi-usufruit

La Cour de cassation affirme le principe que le dividende issu du prix de la vente de la totalité des actifs immobiliers d’une société civile immobilière dont les parts sont démembrées fait l’objet, sauf convention contraire, d’un quasi-usufruit, donc est perçu par l’usufruitier des parts mais revient au nu-propriétaire des parts au terme de l’usufruit.

Une nouvelle contribution par la Cour de cassation à la difficulté du traitement du prix de vente d'un bien immobilier par une société civile immobilière dont les parts sont démembrées. Techniquement la plus-value forme un résultat donc un dividende qui revient traditionnellement au seul usufruitier, en pleine propriété, mais cette réponse ne reflète pas la réalité économique de la transmission mise en place par le démembrement des parts de SCI. Les statuts de SCI doivent donc être spécialement mis au point pour organiser cette situation.

La troisième chambre civile de la Cour de cassation traite le 19 septembre 2024 (https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000050290558/) de ce sujet par un autre aspect : elle justifie le vote par l'usufruitier de la distribution du prix sous forme de dividende en sa faveur, par la mise en place automatique d'un quasi-usufruit qui, au décès de l'usufruitier, transfère au nu-propriétaire ce dividende, et elle énonce ainsi avec force le principe de ce quasi-usufruit, après avis de la chambre commerciale de la Cour de Cassation :

« La distribution, sous forme de dividendes, du produit de la vente de la totalité des actifs immobiliers d'une société civile immobilière affecte la substance des parts sociales grevées d'usufruit en ce qu'elle compromet la poursuite de l'objet social et l'accomplissement du but poursuivi par les associés.

Il en résulte que, dans le cas où l'assemblée générale décide une telle distribution, le dividende revient, sauf convention contraire entre le nu-propriétaire et l'usufruitier, au premier, le droit de jouissance du second s'exerçant alors sous la forme d'un quasi-usufruit sur la somme ainsi distribuée. »

Attention toutefois à ne pas se reposer totalement sur cette nouvelle jurisprudence. Continuons à vérifier le complet traitement juridique de l'appréhension du prix : souvent la SCI vire le prix de vente à ses associés très tôt et sans qualification juridique aboutie, alors que les variantes sont nombreuses : remboursement d'avance ou de compte-courant d'associé, dividende, avance sur dividende, rachat ou remboursement de parts, boni de liquidation...

Et attention aussi au durcissement en cours de l'administration fiscale sur le quasi-usufruit : la qualification juridique n'implique pas le débouclement fiscal idoine au décès de l'usufruitier. Si la voie du quasi-usufruit est retenue, il est important de veiller à sa déductibilité fiscale, qui peut nécessiter un acte notarié, et à vérifier ensuite que cette déductibilité se maintienne dans le futur.

A noter enfin que la création automatique du quasi-usufruit est décidée par la Cour de cassation à défaut de convention contraire entre les associés nus-propriétaires et usufruitiers. Il reste donc essentiel d’agir en amont et de veiller à ce que les statuts reflètent l’intention commune des parties afin de ne pas se laisser imposer une solution contraire à un véritable choix.

                                                                                                                                                                                                 

08/10/2024 Henry Letulle

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