La vente à réméré permet de vendre un bien, en en percevant le prix, tout en conservant la possibilité, moyennant indemnité, d’occuper le bien puis de le racheter dans un délai maximum de 5 ans.
Selon les paramètres économiques d’une telle opération, celle-ci peut être annulée : la Cour de cassation a confirmé le 24 juin 2021 dans une telle hypothèse la qualification d’opération de crédit et la nullité de la vente à réméré en raison de sa nature de pacte commissoire illicite.
L’utilisation de la vente à réméré comme outil de financement doit faire l’objet d’une vigilance particulière.
La situation est souvent la suivante : un particulier ayant des besoins de liquidités, mais incapable d’obtenir un financement bancaire en raison de difficultés, se tourne vers une société spécialisée. Celle-ci va lui acheter un bien immobilier, avec une décote parfois importante, et une faculté de rachat à un prix généralement supérieur dans un délai maximum de 5 ans. Durant cette période, cette société octroie au vendeur une convention d’occupation, avec un loyer qui peut aussi être élevé.
En fonction des paramètres économiques, ce type de montage peut s’analyser comme un financement avec des conditions très avantageuses pour l’acheteur-prêteur. En effet :
Soit le vendeur n’est pas en mesure de racheter son bien. Auquel cas, la société conserve le bien immobilier et peut le revendre avec une importante plus-value, puisqu’il aura été acheté avec une forte décote.
Soit le vendeur est en mesure de racheter son bien, mais avec un différentiel de prix pouvant correspondre à un taux d’intérêt élevé, parfois bien supérieur au taux de l’usure.
Dans les deux cas, les loyers élevés sont une charge onéreuse et supplémentaire pour le vendeur.
Le montage peut revenir économiquement à financer une personne ayant des difficultés financières à des taux supérieurs à l’usure, en étant garanti par un pacte commissoire illicite.
La Cour de Cassation a eu récemment à connaitre d’un tel montage.
Dans le cas d’espèce, un particulier dont la maison faisait l’objet d’une saisie a vendu celle-ci à l’amiable à une société spécialisée avec l’autorisation du juge pour un montant de 380.000. La vente comportait une faculté de rachat au bout de 2 ans pour un montant de… 493.696 € soit une différence de prix de 30%. Le vendeur restant dans les lieux devait en outre régler une indemnité mensuelle de jouissance.
Par une décision n°18-19.771 du 24 juin 2021, la troisième chambre civile de Cour de Cassation rejette le pourvoi formé contre une décision de la Cour d’Appel de Lyon, considérant que cette opération dissimulait une opération de crédit et confirme la nullité de la vente en raison de sa nature de pacte commissoire illicite. A noter que la Cour de Cassation retient que cette opération portait sur la résidence principale du vendeur.
Il est donc nécessaire d’analyser de façon précise ce type de montages, et notamment ses paramètres économiques, pour vérifier s’ils ne dissimulent pas une opération de crédit illicite, qui éluderait les dispositions de la loi protectrices des emprunteurs et dissimulerait un pacte commissoire illicite.
06/10/2021 Arnaud DELOISON