La vente immobilière à rénover - Quand rénovation rime avec prospection

  1. La vente d’immeuble à rénover* est le régime protecteur obligatoire qui s’impose pour toute vente d’un bien immobilier à usage d’habitation dès lors que le vendeur s’engage à réaliser après la vente des travaux sur ce bien immobilier.

  2. La vente d’immeuble à rénover est soumise à des dispositions particulières d’ordre public et aux règles de droit commun. Les actes établis, avant-contrat et vente, doivent comporter un certain nombre d’informations obligatoires.

  3. L’acquéreur paye le prix du bâti existant le jour de la signature de la vente par acte authentique et le prix des travaux au fur et à mesure de leur exécution.

  4. L’acquéreur est protégé par les nombreuses obligations spéciales que la loi met à la charge du vendeur, et principalement par l’obligation pour le vendeur de fournir une garantie financière d’achèvement par laquelle une banque ou une compagnie d’assurance se porte garante de l’achèvement des travaux.

  5. Un homme de l’art détermine la ventilation du prix entre le bâti et le montant des travaux, ainsi que les stades d’avancement des travaux.

  6. L’acquéreur est propriétaire du bien à la signature de l’acte de vente et des ouvrages au fur et à mesure de leur réalisation mais la jouissance du bien est, le plus souvent, reportée à sa livraison.

  7. Le vendeur d’un immeuble à rénover demeure maître d’ouvrage jusqu’à la réception des travaux. Une fois la rénovation achevée, le vendeur réceptionnera les travaux auprès des entrepreneurs avant qu’intervienne la livraison à l’acquéreur.

  8. La réception des travaux constitue le point de départ des différentes garanties que la loi fait peser sur tout constructeur ou rénovateur, et qui sont couvertes par des assurances obligatoires.

Dès lors qu’une personne :

  • vend un immeuble bâti ou une partie d’immeuble bâti (un lot de copropriété par exemple), à usage d’habitation ou à usage professionnel et d’habitation, ou destiné après travaux à l’un de ces usages,

  • s’engage à réaliser après la vente, dans un délai déterminé par le contrat, directement (lui-même) ou indirectement (par l’intervention d’une entreprise), des travaux sur cet immeuble ou cette partie d’immeuble

  • et perçoit des sommes d’argent de l’acquéreur avant la livraison des travaux, le régime de la « vente d’immeuble à rénover » (VIR) s’applique en vue de protéger l’acquéreur.

Ce régime est d’ordre public et s’applique à tous travaux, même de très faible importance. Toutefois, lorsqu’ils consistent en des travaux d’agrandissement ou de restructurations complètes de l’immeuble assimilables à une reconstruction**, ils sont exclus du régime de la VIR pour se voir appliquer le régimede la vente d’immeuble à construire.

Ce régime réglemente notamment l’investissement en loi Malraux ou le dispositif Pinel ancien. En
revanche, il ne peut être utilisé en schéma « déficit foncier ».

DE LA PREPARATION DU CONTRAT DE VENTE D’IMMEUBLE A RENOVER…

Un avant-contrat de vente peut être conclu, par acte sous seing privé ou par acte authentique. Il
n’existe pas de modèle type et obligatoire. Toutefois, cet avant-contrat doit comporter, à peine de
nullité de l’acte, les mentions suivantes :

  • la description et les caractéristiques essentielles du bien vendu (le dossier de diagnostic technique, les surfaces, le nombre de pièces principales, l’énumération des pièces de service, dépendances et dégagements, et le cas échéant, la situation du bien dans l’immeuble) ;les indications essentielles relatives au descriptif et au délai de réalisation des travaux.

  • La qualité des travaux est établie par une note technique indiquant la nature, la qualité des matériaux et des éléments d’équipement, et le cas échéant, l’indication des équipements collectifs qui présentent une utilité pour la partie d’immeuble vendue. Cette note technique doit être annexée à la promesse ;

  • le prix ventilé entre le bâti existant et le montant des travaux, et, le cas échéant, les modalités de la révision du prix des travaux ;

  • l’engagement du vendeur de produire, lors de la signature de l’acte authentique de vente, les justifications de la garantie d’achèvement des travaux et des assurances obligatoires.

Le contrat de vente doit être rédigé en la forme authentique à peine de nullité. Il en est de même des procurations éventuellement données par les acquéreurs.

Le contrat de vente doit comporter un certain nombre de mentions. A défaut, la nullité du contrat peut être invoquée mais uniquement par l’acquéreur et avant la livraison. Ces mentions sont les suivantes :

  • la description et les caractéristiques de l’immeuble ou de la partie d’immeuble vendu, et, le cas échéant, la superficie carrez s’agissant d’un lot de copropriété ;

  • la description des travaux à réaliser précisant, le cas échéant, les travaux concernant les parties communes et ceux concernant les parties privatives ;

  • le prix de l’immeuble avec mention si le prix est ou non révisable et, dans l’affirmative, les modalités de sa révision, ainsi que la ventilation du prix entre le bâti existant et le montant des travaux, attestée par un homme de l’art, professionnel indépendant et impartial. Cette attestation est annexée aux documents contractuels ;

  • le délai de réalisation des travaux (date indicative). Le vendeur peut prévoir des causes de majoration du délai en cas de survenance d’événements fortuits (grèves, intempéries…) ;

  • la justification de la garantie financière d’achèvement des travaux fournie par le vendeur : Le vendeur doit garantir à l’acquéreur que les travaux promis seront achevés. Cette garantie est constituée par une caution solidaire émanant d’un établissement de crédit ou d’une compagnie d’assurances agréée à cet effet ;

  • les justificatifs des assurances de responsabilité et de dommages souscrites par le vendeur :

Tous les vendeurs, quels qu’ils soient, doivent fournir les garanties biennale et décennale et souscrire les assurances de responsabilité et de dommages si la nature des travaux le justifie. 3 Le vendeur professionnel de l’immobilier doit justifier en plus d’une assurance de responsabilité civile professionnelle.

Devront être annexés au contrat de vente un plan coté du local vendu et la notice indiquant les éléments d’équipement propres à ce local.
Les indications utiles relatives à la consistance et aux caractéristiques techniques des travaux doivent être annexées au contrat de vente ou fournies
par référence à des documents déposés chez un notaire. Ces documents sont les suivants : le devis descriptif des travaux, les plans avec les cotes utiles, l’indication des hauteurs de plafond et des surfaces de chacune des pièces et des dégagements, et, si l’immeuble est compris dans un ensemble immobilier, un plan faisant apparaître le nombre de bâtiments de cet ensemble, leur emplacement et le nombre d’étages de chacun d’eux.

Le règlement de copropriété est communiqué à chaque acquéreur. En tout état de cause, il leur est remis lors de la signature du contrat définitif.

La VIR, soumise à des dispositions particulières, reste soumise aux règles de droit commun relatives à la vente d’immeubles existants. A titre d’exemple :

  • L’avant-contrat peut être conclu sous condition suspensive, notamment de l’obtention d’un prêt pour financer l’acquisition.

  • L’acquéreur dispose d’un délai de rétractation ou de réflexion de 10 jours à compter de la notification de l’avant-contrat signé ou du projet de l’acte de vente durant lequel la rétractation est possible sans avoir à se justifier.

  • Autorisé dans le cadre d’une vente « classique » et dans le cadre d’une vente d’immeuble à construire et aucun texte ne le prohibant, le versement d’un dépôt de garantie ou d’une indemnité d’immobilisation au stade de l’avant-contrat peut être prévu par les parties. Toutefois, ce versement ne doit pas concerner une partie du prix des travaux.

  • L’acquéreur peut céder ses droits à un tiers.

  • Le vendeur supporte l’obligation de délivrance et, s’agissant d’un professionnel, est redevable de la garantie des vices cachés.

A noter que, dès lors que l’immeuble n’est pas encore soumis au statut de la copropriété au stade de l’avant-contrat (l’immeuble appartenant encore par hypothèse à un seul propriétaire), les dispositions de la loi ALUR n’ont pas vocation à s’appliquer.

En ce qui concerne la fiscalité, la VIR sera soumise aux droits d’enregistrement, sauf le cas particulier d’un immeuble qui n’est pas encore sorti du champ d’application de la TVA immobilière (immeuble achevé de moins 5 ans au moment de la revente en VIR par le vendeur).

… A SA SIGNATURE

✓ A la signature de l’acte de vente d’immeuble à rénover, le vendeur transfert la propriété du sol ainsi que la propriété des constructions existantes à l’acquéreur qui paye le prix du bâti existant et les frais de l’acte par la comptabilité des notaires. Le notaire remet à l’acquéreur des attestations de propriété en attendant la publication de l’acte de vente signé (en général 3 à 6 mois selon les services de la publicité foncière).

✓ L’acquéreur acquiert la propriété des ouvrages à venir et paye le prix correspondant au fur et à mesure de leur exécution selon un échelonnement figurant à l’acte de vente pouvant comporter des versements intermédiaires mais devant respecter les plafonds suivants :

  • 50 % à l’achèvement des travaux représentant la moitié du prix total des travaux,

  • 95 % à l’achèvement de l’ensemble des travaux, le solde à la livraison.

Le vendeur ne peut exiger ou accepter aucun versement, aucun dépôt, aucune souscription ou acceptation d’effets de commerce avant la date à laquelle la créance est exigible. Cela signifie que tout versement anticipé du prix des travaux est interdit.

Les stades d’avancement des travaux prévus dans la vente d’immeuble à rénover sont constatés par l’homme de l’art choisi par les parties, ou par le juge en cas de désaccord entre elles.

Le paiement des fractions du prix des travaux se fera sur appel de fonds du vendeur notifié à l’acquéreur, par tous moyens, au moyen de l’attestation de l’homme de l’art, indiquant le montant exigible, et rappelant le délai et le lieu de paiement. La banque, intervenant dans le cadre du financement de l’acquisition, débloquera les fonds prêtés au fur et à mesure de la présentation des appels de fonds.

✓ Le vendeur d’un immeuble à rénover demeure maître d’ouvrage jusqu’à la réception des travaux. Il conserve ainsi le contrôle exclusif du chantier, et la charge des risques, l’entrée en jouissance de l’acquéreur étant, par hypothèse, reportée à la livraison. Ses pouvoirs comportent ceux de choisir les architectes, entrepreneurs et autres techniciens, d’arrêter librement les conventions passées avec eux et d’effectuer la réception des travaux qu’ils ont faits ou dirigés, y compris les travaux nécessaires à la levée des réserves. Ils comportent également ceux de faire toute demande d’autorisation ou déclaration prévue au code de l’urbanisme et nécessaire à la réalisation des travaux faisant l’objet du contrat.

La vente peut également être assortie d’un mandat donné par l’acquéreur au vendeur à l’effet de passer les actes de disposition devant affecter les biens et droits vendus et indispensables à la réalisation des travaux prévus au contrat***.

Une fois que la rénovation est achevée, le contrat de vente d’immeuble à rénover prend fin en trois étapes.

DE L’ACHEVEMENT DES TRAVAUX…

L’achèvement des travaux est constaté.

✓ Les travaux de rénovation sont réputés achevés lorsque ceux prévus au contrat sont exécutés. Pour l’appréciation de cet achèvement, ne sont pris en considération ni les défauts de conformité avec les prévisions du contrat lorsqu’ils n’ont pas un caractère substantiel, ni les malfaçons qui ne rendent pas les ouvrages nouveaux impropres à leur utilisation.

✓ La constatation de cet achèvement résulte de la déclaration certifiée par l’homme de l’art.

✓ La garantie financière prend fin.

…EN PASSANT PAR LEUR RECEPTION…

Intervient ensuite la réception des travaux par le vendeur.

✓ Il s’agit de l’acte par lequel, après vérification de la bonne exécution des travaux, le vendeur déclare accepter l’ouvrage auprès des entrepreneurs. Le vendeur peut formuler des réserves sur les travaux réalisés.

✓ La réception des travaux est effectuée pour l’ensemble des travaux à une date unique et se traduit concrètement par la signature d’un procès-verbal de réception entre les parties.

✓ Cette réception constitue le point de départ des garanties, notamment :

  • La garantie de parfait achèvement, à laquelle les entrepreneurs sont tenus pendant un délai d’un an. Elle s’étend à la réparation de tous les désordres signalés par le maître de l’ouvrage, soit au moyen de réserves mentionnées au procès-verbal de réception, soit par voie de notification écrite pour ceux révélés postérieurement à la réception. Les délais nécessaires à l’exécution des travaux de réparation sont fixés d’un commun accord par le maître de l’ouvrage et l’entrepreneur concerné. La garantie ne s’étend pas aux travaux nécessaires pour remédier aux effets de l’usure normale ou de l’usage.

  • Les garanties décennale et biennale dont bénéficie l’acquéreur, dès lors que les travaux sont susceptibles d’y donner lieu (chaque fois que les travaux de rénovation caractérisent la construction d’un ouvrage). En effet, tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit, pendant dix ans, envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, des dommages, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination. Elle s’étend également aux dommages qui affectent la solidité des éléments d’équipement d’un ouvrage, mais seulement lorsque ceux-ci font indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d’ossature, de clos ou de couvert, c’est à dire lorsque sa dépose, son démontage ou son remplacement ne peut s’effectuer sans détérioration ou enlèvement de matière de cet ouvrage.

Les autres éléments d’équipement de l’ouvrage font l’objet d’une garantie de bon fonctionnement d’une durée minimale de deux ans.

…A LA LIVRAISON DE L’IMMEUBLE

Enfin intervient la livraison du bien entre le vendeur et l’acquéreur.

✓ Le vendeur convoque l’acquéreur, ou son mandataire, afin de procéder à l’établissement du procès-verbal de livraison des travaux. Cette convocation est notifiée à l’acquéreur ou à son mandataire par lettre recommandée avec demande d’avis de réception reçue au moins quinze jours avant la date prévue pour la livraison ou par tout autre moyen présentant des garanties équivalentes pour la détermination de la date de réception ou de remise. Le procès-verbal de réception des travaux est annexé à la convocation.

✓ La livraison du bien sonne l’entrée en jouissance de l’acquéreur. Le vendeur remet les clés à l’acquéreur qui règle les cinq derniers pourcents du prix des travaux. Ce solde peut néanmoins être consigné en cas de vices de construction ou de défauts de conformité apparents affectant les travaux et dénoncés par l’acquéreur dans l’acte de livraison des travaux (les réserves). Ces réserves peuvent porter notamment sur des éléments cassés, qui ne fonctionnent pas ou qui ne sont pas conformes à ce qui avait été promis, ou encore de finitions mal réalisées.

✓ Si l’acquéreur ne se présente pas le jour prévu, le vendeur peut faire désigner une personne qualifiée par le président du tribunal de grande instance, qui constatera la livraison des travaux.

✓ En ce qui concerne les travaux portant les parties communes de l’immeuble, la livraison interviendra le plus souvent, pour des raisons pratiques, entre le vendeur et le syndic.

ET APRES

✓ Les vices de construction ou les défauts de conformité apparents affectant les travaux, non dénoncés dans le procès-verbal de livraison, peuvent encore être dénoncés par l’acquéreur dans le mois qui suit la livraison. Le vendeur, redevable de la garantie des vices et des défauts apparents, fera jouer la garantie de parfait achèvement dont il bénéficie dans ses rapports avec les entrepreneurs afin que les réserves soient levées.

✓ L’action en réparation devant les tribunaux des vices de construction ou des défauts de conformité ainsi dénoncés doit être intentée dans un délai d’un an après la livraison.

✓ Les dommages touchant les éléments d’équipement ou l’ouvrage doivent être dénoncés dans un délai de deux ans ou de dix ans qui suivent le procès-verbal de réception, selon la nature des éléments concernés.

10/04/2018 – Emmanuelle te Rietmolen

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